En ce troisième jour de #TeleportezVous, j’ai eu encore une fois envie de vous parler d’une ville que j’apprécie beaucoup. Il s’agit de Barcelone. Deuxième métropole d’Espagne ou première de Catalogne (c’est selon), c’est la ville de Cerda (nous y reviendrons), de Gaudi, d’Ada Colau ! Une ville que j’ai l’occasion de traverser et de contempler assez souvent. Comment ? Souvent à pied ou à vélo, (elle s’y prête tellement bien), rarement en métro (on y suffoque), et de plus en plus souvent en bus. Et c’est justement du réseau de bus que j’ai envie de vous parler. Parce qu’à Barcelone, il a une petite particularité. Montez le son, je vous embarque.
Si je vous dis H16, D20, V20, vous pensez ? au touché-coulé ? Loupé. Il fallait me répondre « Xarxa », le nouveau réseau de bus de Barcelone ! Vous êtes perdus ? Je comprends. Alors je vais éviter de me lancer dans une grande explication technique du travail réalisé par le chercheur Carlos Daganzo, celui là même qui a imaginé ce nouveau réseau (lisez plutôt l’excellent blog de Jarrett Walker à ce sujet). Mais à la place, je vais humblement essayer de vous expliquer le système, avec une casquette d’usager, comme je le fais d’habitude.
En ce mois d’Octobre, je souhaitais me rendre depuis mon hotel à Poblenou jusqu’au parc Güell, au nord pour aller me balader. Si j’avais souhaité faire ce trajet il y a quelques années, avant 2012 pour être précis, je pense que j’aurais eu quelques difficultés. Parce que le réseau de bus, c’était une sorte de spaghettis indigeste. Il était l’héritier du réseau de tramway d’il y a un siècle. Avec la croissance de la ville, les lignes s’étaient étendues et se chevauchaient pour créer un réseau illogique, avec une redondance entre les lignes et les itinéraires qui pénalisait la vitesse et la fréquence de passage.
A partir de 2012, la puissance publique a décidé de mettre un gros coup de pied dans la fourmilière. Progressivement, TMB (l’opérateur public) a mis en place un nouveau système, avec pour objectif de déployer 28 axes avant l’automne 2018. Plusieurs phases se sont succédées quasiment chaque année entre 2012 et 2018. Mais reprenons, encore une fois je digresse. En quoi ce système de bus a un impact sur mon trajet Poblenou au Parc Güell ? Regardez le plan du nouveau réseau (Xarxa), vous comprendrez. Encore un truc d’ingénieurs, de chercheurs, ou de gens du marketing (avec de belles couleurs) ? Moi aussi je me suis dit la même chose !
Regardez d’encore un peu plus près (ou cliquez sur le plan, c’est encore mieux), c’est tout simplement du bon sens. Les 28 lignes « à haute performance » ont une configuration bien particulière :
- il y en a 17 Verticales, dans le sens mer-montagne : elles sont numérotées avec des chiffres impairs, de V1 (à gauche) à V30 (à droite) et sont de couleur verte,
- il y en a 8 autres Horizontales, entre les deux cours d’eau, Llobregat d’un coté, et Besòs de l’autre : elles sont numérotées de H2 (en haut) à H16 (en bas) et de couleur bleue,
- il reste encore 3 autres Diagonales, numérotées de D20 à D50 et de couleur violette.
Vous commencez à comprendre ? Alors passons aux exercices pratiques. Rappelez vous, je souhaitais aller de Poblenou au Parc Güell. Selon toute vraisemblance, à vue d’oeil, je vais devoir prendre une verticale (la V27) puis une horizontale (H6) ou une diagonale (la D40) et finir à pied. C’est une option parmi d’autres bien sur ! Une fois que l’on a compris le système c’est un vrai jeu d’enfant (vous pouvez cliquer sur la carte ci-dessous pour zoomer).
Mais sur le terrain ça donne quoi ? C’est aussi intelligent que sur le papier. Il faut juste comprendre que le nouveau système « Xarxa » pousse à réaliser des correspondances. C’est une posture rare pour un exploitant, car on le sait, la rupture de charge est toujours crainte. Pour autant, cela permet de positionner des lignes performantes et plus lisibles. C’est ce choix qui a été fait à Barcelone. Mais pour le rendre attractif pour les usagers, TMB a aussi poussé des fréquences très importantes (souvent entre 5 et 8 minutes) et déployé beaucoup de couloirs réservés. Par conséquent, switcher d’un bus à l’autre n’est pas si contraignant.
Mais dans la pratique, changer de bus c’est aussi trouver le bon abribus, dans le bon sens, avec le bon numéro de ligne, du bon coté de la route. Là encore, tout a été plutôt bien pensé. Coté abribus, un modèle unique a été créé, et déployé sur tout le réseau, afin de rendre compréhensible le système. Je vous laisse voir la théorie, et la pratique.
La gestion des zones d’échange / de swap, là où les lignes verticales, horizontales et diagonales se croisent dans les deux directions, a également été bien pensée. Les codes (lettres, couleurs) sont systématiquement repris, les directions sont précisées, des schémas très pédagogiques ont été disposés dans les points stratégiques, et on utilise la signalétique y compris au sol (j’avais rarement vu cela). Tout est d’ailleurs très bien expliqué (il faut parler catalan ou espagnol) sur le site de l’opérateur. J’avais là encore rarement vu un tel souci de la pédagogie pour les usagers.
Quels sont les résultats d’un tel plan ? D’après ce que j’ai lu, c’est plutôt un succès puisque les fréquentations ont augmenté un peu partout, depuis le début du processus de restructuration. Coté usagers, je ne sais pas si l’impact a été énorme. Les barcelonais que je connais m’ont confirmé que le système fonctionnait plutôt bien. De mon coté, je le trouve intuitif et plutôt efficace. Conclusion ? J’avoue que j’utilise assez souvent le bus, en complément du vélo, lorsque je suis à Barcelone. Concernant mon trajet Poblenou-Parc Güell ? Il s’est super bien passé, la correspondance était top. Surtout, je suis sur qu’avec tout ce que je vous ai raconté, vous avez vous aussi trop envie d’essayer. En attendant demain, #TeleportezVous, je suis votre guide ! Et puis, quelques photos pour la route.