Amérique : Seattle, pionnière mondiale dans la numérisation de la voirie

En Europe, le terme Curbside Management ne signifie pas grand chose. A l’inverse, de l’autre coté de l’Atlantique, il mobilise les équipes des municipalités, agite les startups et vient de bénéficier de plusieurs dizaines de millions de dollars de fonds fédéraux. Pourquoi ? Parce que le Curbside Management, c’est une méthode systémique permettant de traiter tout ce qui se passe entre la bordure du trottoir et la voirie, avec une forte intervention technologique. Une manière maline de répondre à un grand nombre de problématiques concrètes : créer du stationnement pour les vélos, augmenter le prix d’un parcmètre, réguler les trottinettes en free floating, taxer les livraisons d’Amazon Prime, libérer de l’espace pour un bus à haut niveau de service… et j’en passe. L’Institute of Transport Engineers (US) résume en une phrase l’aspect systémique de la dynamique : “Curbside management exists at the nexus of transportation, land use, and economic development”. Bref, les américains s’activent sérieusement sur le sujet. Et à ce jeu, une ville est clairement pionnière : il s’agit de SeattleC’est en effet cette chouette métropole de la côte ouest, démocrate, progressiste, souvent en avance sur les sujets de mobilité (elle fait notamment partie de la démarche Vision Zéro) qui a depuis longtemps pris le lead sur le sujet. Et c’est évidemment pour cette raison que j’ai décidé de m’y rendre courant 2023. 

Seattle, la précoce

Pionnière depuis 10 ans

Seattle travaille sur le sujet du Curbside Management depuis plus de 10 ans. S’y rendre permet donc de comprendre les enjeux de cette thématique, mais permet également de disposer de suffisamment de recul pour en faire une critique objective.

D’abord, observer une rue du downtown de Seattle permet de coller un concept spatial au curbside management. Il y a encore quelques années, nous entendions ici et là une définition relativement commune du curbside “il s’agit de l’espace entre la façade d’un bâtiment et la rue”. En réalité, cela est plus complexe. Le curbside (dans la logique du management) est un espace d’interactions, d’interfaces, de relations, d’entre deux. C’est une bande, un espace qui sépare le flux de piétons du flux de véhicules motorisés. Cette bande peut selon les cas, selon les territoires, recouvrir plusieurs réalités. Le curbside peut tout autant répondre à des fonctions de déplacement, que d’accès temporaire, de stationnement, d’animation ou encore de cadre de vie. En lien avec ces différentes fonctions, les zones et équipements sont différents, les acteurs divers, les traitements possibles multiples. A Seattle, la taille de la ville et sa configuration en font un excellent modèle pour comprendre la dynamique. 

Une définition très fine du curb

Les politiques de gestion du Curbside de Seattle ont attiré l’attention en 2016 lorsque le SDOT (Seattle Department of Transportation) a troqué le terme “curb space” pour “flex zone”, afin de reconnaître la nécessité pour chaque bordure de s’adapter différemment aux besoins de son corridor. Comme l’indique le SDOT : “Dans les rues de Seattle, les bus, les voitures, les tramways, les vélos et les camions déplacent des personnes et des marchandises. Les trottoirs offrent un espace aux piétons pour se déplacer, attendre leur bus et se rendre là où ils veulent aller. Entre les deux se trouve l’espace flexible où les gens trouvent leur bus, garent une voiture, hèlent un taxi, déposent un passager ou font une livraison.” Ainsi, le SDOT définit trois types de zones : 

  • La zone piétonne : elle comprend les zones de mobilité piétonne en façade, et les zones de mobilier entre la limite de propriété et les zones flexibles ou de circulation. Cet espace comprend le trottoir, ses cafés et par exemple des supports à vélos. 
  • La zone de mobilité : elle est utilisée à des fins de mobilité / déplacements. Les voies peuvent être dédiées à un mode, comme le bus ou le vélo, ou utilisées par tous les modes. 
  • La zone flexible : une zone essentielle pour les personnes et les biens, qui permet une séparation entre les véhicules en mouvement dans la zone de mobilité et les personnes sur la zone piétonne. Cette zone peut répondre à des usages multiples y compris des livraisons commerciales, des parklets, du stationnement sur voirie, des zones de taxis. Elle peut être utilisée dans une logique de mobilité à des moments spécifiques de la journée. 

Une numérisation précoce

Seattle a été la première ville aux Etats Unis et sûrement dans le monde à indexer le curbside et l’ensemble des panneaux liés, le tout dans toutes les zones à enjeux de la ville. L’objectif était pour cette dernière de pouvoir par la suite mettre en place des politiques publiques réellement adaptées à la réalité de l’usage. C’est un travail colossal qui a été réalisé par la municipalité. La quantité de données que le SDOT a numérisé est absolument énorme: 90.000 panneaux sur voirie, 40.000 zones cartographiées… 

Le SDOT met à disposition un outil qui permet de visualiser les Curb Spaces et Temporary No Parking ZonesIl a classé les zones en trois grandes catégories : celles qu’il s’agit de réserver, celles qui sont généralement non disponibles, et celles qui ne le sont clairement jamais. Des sous catégories permettent ensuite de connaître de manière très précise la manière dont il est possible d’utiliser tel ou tel espace ou encore de le réserver. Il met également à disposition une seconde couche qui recense l’ensemble des panneaux disponibles sur la voirie. Un lien Google Street View est associé à chaque Block-ID+Curb Space. L’objectif est de pouvoir visualiser de manière précise la rue associée à la donnée.

A Seattle, en fonction du type de zone ou l’on se trouve, la priorité est donnée à telle ou telle fonction. Cela permet à la municipalité de prioriser les usages de tout ou partie du curbside. 

Seattle a donc pris de l’avance en numérisant l’ensemble de son territoire. Mais avec l’évolution de la standardisation et l’arrivée de nouveaux formats d’échange, comme le CDS, la municipalité a du revoir un peu sa copie. Un de ses défis actuels est de pouvoir convertir l’ensemble de ses dispositifs au standard CDS, afin de répondre aux enjeux à venir. Le SDOT a de la chance : le directeur général de l’Open Mobility Foundation (OMF), Andrew Hastings, qui pilote l’évolution de CDS, vit justement à Seattle. La municipalité est d’ailleurs membre d’OMF et participe à de nombreux projets sur le sujet des données et de leur standardisation. Un atout considérable !

Une (solide) équipe dédiée

A Seattle, l’équipe dédiée au Curb Management est composée de 28 ETP dont cinq gèrent la stratégie même de Curb Management. Ils décident de l’allocation du curb en fonction des usages, communiquent à l’équipe “parking” les éléments à mettre à jour sur le terrain, conçoivent la signalétique à installer sur l’espace public, répondent aux demandes de nouvelles signalétiques et enfin, examinent les possibilités d’évolution du curbside, aux vues de la stratégie de la SDOT. Mary Catherine Snyder, cheffe d’équipe au SDOT l’évoque dans notre documentaire vidéo. 

Le curb au service du parking program

Le stationnement est historiquement la thématique qui a été la plus travaillée par les différentes municipalités américaines et c’est sûrement la thématique qui a le plus été étudiée mais aussi expérimentée sur le terrain.

Une stratégie de stationnement qui a 10 ans

A Seattle, le Parking Program n’est pas nouveau. Cela fait plus de 10 ans que la municipalité a acté sa stratégie concernant le stationnement, et qu’elle la fait évoluer très régulièrement. Les objectifs sont assez classiques : équilibrer l’offre et la demande, pouvoir assurer la mobilité des biens et des personnes et assurer la viabilité des commerce. Le tout dans une ville ou les recettes liées au stationnement étaient d’environ 40M$ / an avant le covid. 

Une volonté de dématérialiser

Au delà de son programme stratégique, la ville poursuit également une dynamique qui vise à  dématérialiser le paiement. Pour cela, elle compte beaucoup sur l’utilisation du smartphone. Elle a généralisé l’app PayByPhone… tant et si bien que déjà, avant le COVID, la moitié des paiements de stationnement étaient effectués sur cette dernière. Gage de facilité pour les utilisateurs, c’est aussi une manière de digitaliser l’ensemble du processus de récupération des données et de limiter le nombre de parcmètres dans la ville. La digitalisation ne s’arrête pas là : depuis de nombreuses années, le SDOT dispose d’une base de données exhaustive du curbside pour l’ensemble des quartiers à enjeux : cela lui permet de suivre facilement son programme à l’échelle de la ville, de diffuser les données mises à jour sur ses nombreux outils de visualisation du curb et de gérer la mise à jour des dispositifs de paiement (parcmètres, PayByPhone) mais aussi et surtout les panneaux déployés sur la voirie. 

Une tarification “un peu” dynamique

Enfin, parmi les axes forts de la politique de stationnement de la ville, il y a ici aussi le “performance based parking pricing program”, pour lequel le curbside management joue un rôle fondamental. Depuis 2010, Seattle (le SDOT) utilise des données d’usages (via les transactions des parcmètres, des utilisateurs de PayByPhone ainsi que des comptages régulièrement effectués dans toute la ville) afin de prédire l’activité de stationnement. Cela lui permet de fixer les tarifs et les horaires du stationnement sur voirie en fonction des données recueillies en suivant plusieurs objectifs d’occupation pré-définis. Et depuis 2014, le SDOT ajuste la politique de stationnement : tarif d’un côté, limitations de l’autre, de manière très régulière et en publiant les évolutions en open data. 

Le curb, un outil de recherche pour la logistique

Le e-commerce a connu une évolution sensible ces dernières années, et la croissance observée n’est, selon les experts, pas prête de marquer le pas. Cela a des conséquences évidentes sur le curbside et ses usages. Parce qu’au-delà du e-commerce (et des colis) qui connaît une forte croissance, il y a déjà beaucoup d’autres types de livraisons : alimentation, restaurant, commerce de détail… qui eux aussi, prennent de plus en plus de place en ville. Chacun avec sa propre temporalité.

Des projets innovants 

A Seattle, le SDOT gère les livraisons grâce à des zones spécifiques dites Commercial véhicules loading zones (CVLZ). Ces zones sont accessibles via un permis payant (environ 250$/an) et associées à certaines limites dans la durée de stationnement. Ce programme existe depuis plus de 30 ans et le SDOT délivre 4 000 permis chaque année.

Ainsi, à l’heure actuelle, le SDOT ne dispose pas d’une approche basée sur la performance / la demande réelle ou dynamique pour gérer la demande des CVLZ. Mais elle travaille sur le sujet. Elle fait d’ailleurs partie des 9 projets retenus dans le cadre du Smart Grant, et va mobiliser 2M$ pour travailler sur le “last mile freight curb access”. Ce projet pourra compter sur la dynamique déjà lancée par le SDOT il y a longtemps, à savoir la digitalisation de l’ensemble de son curbside. Ainsi, la ville est déjà en mesure de proposer différents programmes liés aux loading/unloading zones. 

Un partenariat unique au monde

Par ailleurs, le SDOT fait partie d’un partenariat unique au monde mené avec l’Université de Washington (UW), au sein du Urban Freight Lab (UFL). Plusieurs projets intéressants sont à noter : 

CLZ Belltown : selon une étude récente de l’UW, de nombreuses CVLZ dans le centre-ville ont un taux d’occupation supérieur à 90 % et seuls 13% des bâtiments du centre-ville disposent de quais de chargement dédiés. Le SDOT a travaillé avec ses partenaires pour mieux comprendre les exigences d’une livraison efficace de marchandises en ville. Le SDOT a complété son programme par l’installation de capteurs visant à mieux comprendre l’occupation des CVLZ. Grâce à ces capteurs, il était possible d’observer si des véhicules étaient présents dans les CVLZ et combien de temps ils y restaient. Les données collectées étaient envoyées en temps réel à l’UW et aux partenaires du projet. Forte de ces enseignements, le SDOT annonçait étendre et ajuster 29 CVLZ.

Final 500 Feet : il consistait en une triple observation : analyser à la fois les rues et les buildings dans le système de livraison de marchandises (trottoir, quais de chargement et allées), comprendre comment les livreurs se déplacent (notamment avec leurs chariots…) et quels étaient les processus de livraisons dans les “tours”. In fine, les objectifs étaient de limiter la présence des camions sur la voirie ainsi que de réduire le nombre d’échecs lors des premières livraisons. Pour cela, toute la chaîne de livraison a été étudiée et observée (entrée, livraison, sortie) et les durées associées scrutées.

La simulation en Open Source : Tom Maxter est parti du constat que les villes ont tendance à changer le rôle du curbside, sans réellement savoir quel sera l’impact de ces changements.  Pour justement analyser cet impact, il a utilisé le logiciel PTV Visum pour simuler les rues d’un centre-ville puis les données de la ville de Seattle (nombre de véhicules par heure, d’offres partagées, types de véhicules…), pour créer des scénarios spécifiques. L’objectif était de voir quels étaient les impacts de changements sur le volume de passagers et de marchandises au droit du curbside. Ensuite, un outil a été créé en open source afin de pouvoir calculer les émissions de CO2 liés à chaque scénario de la modélisation. Cet outil a pour objectif d’être mis à disposition des autres villes.

Cruising for CVLZ : Giacomo Dalla Chiara a travaillé sur un premier projet qui consistait à évaluer le temps de stationnement des véhicules de livraison et à évaluer le temps de recherche de stationnement de ces différents véhicules. Dans le cadre du projet mené avec le SDOT de capteurs déployés dans downtown (nous l’évoquions quelques lignes plus haut), l’UW souhaitait pouvoir récupérer des données de disponibilité du curb en temps réel, afin de les mettre à disposition de certains livreurs, et d’évaluer l’impact sur le temps de recherche de stationnement. Les conclusions de ces travaux sont présentées dans l’exploration complète. 

Des pick up zones inédites 

Définir une stratégie de curbside management claire et précoce a des avantages. La période du covid a permis à la municipalité de s’en rendre compte.

Ainsi, à la mi-mars 2020, le SDOT a installé plus de 700 zones de retrait prioritaire pour les denrées alimentaires, limitées à 3 minutes, donnant accès à plus de 400 restaurants : les Food Priority Pick up zones. C’est l’une des nombreuses façons dont Seattle a modifié temporairement la réglementation du stationnement et son application pendant la pandémie de COVID. Evidemment, le fait de posséder une base de données du curbside a aidé à créer une carte pour les habitants, mais aussi à déployer rapidement les panneaux sur la voirie. 

En Mars 2020 toujours, s’appuyant sur le succès du Food zones, le SDOT a déployé des zones de chargement temporaires de 15 minutes (Curbside Pickup zones ) afin de faciliter l’accès des clients pour le retrait de leurs achats. Il s’agissait aux commerçants de contacter le SDOT s’ils souhaitaient en bénéficier, cette dernière réalisant elle aussi un audit des zones les plus concernées. 

Maintenant que la période de COVID est terminée, le SDOT ne déploie plus de zones spécifiques “PickUp”. Elle a créé 120 zones, mais avec une durée intermédiaire de 5 minutes et a prolongé les horaires de plus de 110 zones de chargement existantes pour mieux tenir compte des horaires habituels des restaurants, de 18 à 22 heures.

Des nouvelles mobilités sensibles au curb

Seattle mais de manière plus large, les Etats Unis, ont historiquement focalisé leur démarche de Curbside Management sur les usages liés à l’automobile. Mais progressivement, en parallèle de l’évolution de la demande des habitants, cette dynamique évolue. Les municipalités, mettent à contribution leurs outils de curbside management pour prioriser certaines thématiques : le déploiement d’infrastructures cyclables, que ce soit les aménagements ou le stationnement ; la promotion des offres de micro mobilité partagées (ex : trottinettes, VLS…) ; l’accélération du déploiement de la logistique urbaine, notamment autour de la cyclo logistique ou encore l’électrification du parc automobile, notamment via le déploiement de bornes de recharge.

De plus en plus de VTC

La demande de VTC ne fait que croître depuis déjà plusieurs années. A Seattle, chaque habitant fait en moyenne 33 trajets par an et en véhicule avec chauffeur (contre 19 à New York). Cela représentait lors de la période pré-covid, 24 millions de trajets, uniquement pour Uber et Lyft. Cette pratique impacte fortement l’usage du curbside et aujourd’hui, la situation n’est pas satisfaisante. Aucun espace n’est dédié à la pratique, ou alors, lorsque c’est le cas, il est bien souvent peu adapté à la réalité de la demande. Au final, les double files sont trop souvent observées. Si les technologies comme le geofencing peuvent améliorer certaines situations, il est surtout primordial de travailler au plus près des acteurs majeurs afin d’accéder à leurs données d’usage, et de les intégrer dans les recherches.

A Seattle, au sein du SDOT, les VTC font partie de la feuille de route pour les années à venir. En 2019, la municipalité a lancé un projet pilote baptisé “Ride Hail”. Le SDOT s’est associé au service de police de Seattle ainsi qu’à Uber et à Lyft et enfin, aux organisations commerciales et communautaires de Capitol Hill pour élaborer un programme de tests. L’idée ? Dès les jeudis soirs, les clients de Pike/Pine cherchant à se faire conduire par Uber ou Lyft étaient dirigés vers des zones d’attente spécifiques, en utilisant le geofencing. Ces dernières étaient indiquées sur les apps, et le SDOT avait mis en place une nouvelle signalétique limitant le stationnement à ces endroits. Le projet a permis, durant sa courte durée de vie, d’améliorer la circulation à l’approche de la nuit à Capitol Hill, le SPD affirmant de son côté que sa capacité à patrouiller et à intervenir dans la zone s’était améliorée, et que les foules s’étaient dispersées plus rapidement et avec moins de perturbations. Cette expérimentation montre à quel point il est important de pouvoir collaborer avec les opérateurs tels que Uber et Lyft pour réussir à faire évoluer cette problématique. D’ailleurs, seuls ces deux opérateurs étaient en capacité d’utiliser le geofencing lors du pilote de le SDOT à Seattle. Cette dernière a tout de même donné l’autorisation aux taxis et autres VTC de charger et décharger dans ces zones s’ils le souhaitaient.

Une multiplication des infrastructures cyclables 

Progressivement, la municipalité – et elle fait plutôt figure d’exemple à l’échelle des Etats-Unis – tente de déployer des voies cyclables sécurisées. Une des priorités consiste à séparer les voies circulées par les cyclistes, de celles circulées par les voitures, mais aussi celles liées au stationnement. En suivant les préceptes de la NACTO, la municipalité a déployé de nombreuses pistes bi-directionnelles, séparées de la voirie. Elle a également déplacé de nombreuses zones de stationnement afin de créer des zones “buffer” et ainsi d’améliorer la sécurité pour les deux types d’utilisateurs.

Ainsi, la connaissance de la configuration du curbside est importante, pour penser les projets, puis pour actualiser les règles en vigueur. La question de la représentation de l’ensemble des usages, notamment lorsque leur rôle aurait vocation à changer, est fondamentale. Une meilleure intégration des données vélo au sein des bases de données du curbside est donc un enjeu important. 

Le déploiement de bornes de recharge

Seattle City Light est le service public qui fournit de l’électricité à Seattle. Depuis Mars 2023, l’institution installe et exploite des chargeurs publics de niveau 2 pour véhicules électriques sur les trottoirs de la ville de Seattle. City Light propose ce service pour permettre aux habitants qui n’ont pas accès à un parking en dehors de la rue de recharger leur véhicule à proximité de leur domicile. Ce déploiement se fait en étroite collaboration avec les services du SDOT. Ce dernier peut utiliser sa base de données du curbside pour proposer les meilleurs emplacements de recharge. Et la localisation est un sujet majeur, puisque 31 sites ont été sélectionnés pour la première phase pilote, alors que 1800 demandes avait été reçues. L’intégration des bornes de recharge pour véhicules électriques fait partie des sujets sur lesquels le SDOT va se concentrer dans les mois à venir, comme l’évoque Mary Catherine Snyder. C’est également un sujet de réflexion pour l’OMF, qui souhaite intégrer cette dynamique dans le standard CDS. 

Le curb aussi pour les ….food trucks 

Les livraisons de nourriture à domicile sont montées en flèche durant la pandémie, mais un autre phénomène semble s’installer durablement dans les pratiques quotidiennes des habitants de Seattle, à savoir les food trucks. Et ces derniers utilisent évidemment le curbside, de manière provisoire ou pérenne. Là encore, le curbside management a donc un intérêt, afin d’optimiser leur fonctionnement. Ainsi, la municipalité expérimente différents programmes qui visent à : 

  • Planifier : utiliser les réglementations relatives au curbside pour filtrer les espaces à autoriser (ex : allouer les camions de nourriture à une distance déterminée des restaurants ou d’autres entreprises dans le voisinage) ; assurer la répartition des trucks à l’échelle de la ville et soutenir le processus d’émission des permis électroniques pour faire correspondre offre et demande.
  • Gérer : programmer l’attribution des places en bordure de trottoir, et relier le calendrier aux analyses de l’utilisation et des recettes et suivre les emplacements des food trucks et leur activité en temps réel.
  • Adapter : identifier et créer des zones d’utilisation temporaire spéciales pour répondre à la demande lors d’événements ou en réponse à un pic de demande pour un certain emplacement et communiquer les changements de permis, les zones disponibles ou encore les zones temporaires. 

Bref, vous l’aurez compris… Seattle est la ville idéale pour comprendre les enjeux du curbside management et imaginer leur adaptation dans un contexte plus proche de nos contrées. Même si elle est américaine, elle partage avec les villes européennes de nombreuses problématiques : montée en puissance des infrastructures cyclables, besoin d’améliorer la gestion des marchandises en ville, multiplication des solutions de mobilité active, déploiement de bornes de recharge etc… Même si c’est la capitale de l’Etat de Washington, elle reste à taille humaine (700.000 habitants) et permet la comparaison avec bon nombre de capitales européennes. Ce qui s’y passe ici pourrait donc inspirer bon nombre de villes qui tôt ou tard se retrouveront concernées par les mêmes problématiques. 

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